Tout a commencé neuf mois avant ma naissance … logique me direz-vous ? Oui, en quelque sorte. Mon papa … je sais pas grand chose de lui, à part ce que m’a dit ma mère, sauf que je ne suis pas sûre de lui faire confiance. Ce que je sais, c’est que c’était un motard, et rien que ça, ça fait de lui un papa vachement cool ! Il a rencontré ma mère par hasard, et ils ont eu une aventure. Oh, rien de bien méchant, vraiment, c’est juste que quelques semaines plus tard, ma mère s’est rendue compte que je m’étais installée sous son nombril. Autant vous dire que je n’étais pas vraiment attendue, mais étant donné que mes grands parents sont de fervents catholiques, bah ma mère n’a pas eu d’autres choix que de me garder. Pas encore née, et déjà je m’incrustais !

Je suis née le quinze mars deux-mille-un, à Broadway. Enfin, à l’hôpital, mais ma mère a perdu les eaux à Broadway. Je sais pas, j’avais peut-être envie d’aller voir une des comédies musicales ! On m’attribua le prénom de Mia, et si vous fouinez un peu, vous découvrirez qu’il est dans le top cent des prénoms les plus donnés aux États-Unis. Je crois que ma mère avait pas envie de se casser la tête ce jour-là. Puis, mon deuxième prénom, c’est celui de ma grand-mère, Isobel. Au final, ça a donné Mia Isobel Bones, et si ça sonne un peu nul comme ça, mes initiales ça fait M.I.B. Comme dans Men In Black, ouais. J’ai grandi dans le Queens, ce qui est vachement cool aussi puisque c’est de là que vient Captain America. Alors ouais, j’ai pas été conçue dans les meilleures conditions, mais au final, on m’a rapidement donné toutes les cartes pour avoir une vie digne d’un comic book !

Ma mère a toujours eu un rêve : devenir mannequin. Faut dire qu’elle est bien foutue, mais pas assez pour les agences. Elle a tourné dans deux trois publicités quand j’étais petite, et depuis elle a vachement pris le melon. Pour avoir de nouveaux contrats, on peut dire qu’elle était prête à tout ! Vous pouvez appelez ça de la détermination si vous voulez, mais quand vous passez de sugar daddy en sugar daddy, moi j’appelle ça de la prostitution. Enfin, que celui qui n’a jamais pêché lui jette la première pierre, comme dirait ma grand-mère. C’est d’ailleurs cette dernière qui m’a élevée quand j’étais petite. Elle était cool ma grand-mère, même si elle était vachement stricte. Elle m’aimait bien, je crois, ce qui un fait suffisamment rare que pour être souligné. Je passais généralement mes vacances avec elle, grand-père, et Bill : un bull terrier sourd comme un pot. Mon grand-père était féru de technologie, et c’est grâce à lui que j’ai touché à ma première console rétro : il l’avait cachée dans le garage pour pas se faire griller par grand-mère, et du coup quand il jouait, il prétendait bricoler la deux-chevaux.

Puis un jour, ma grand-mère a été diagnostiquée avec Alzheimer, et tout a été très vite : du jour au lendemain, elle ne savait plus qui elle était, ni même qui était ‘le séduisant monsieur’ qui s’occupait d’elle. Je crois que mon grand-père n’a plus jamais joué depuis. Je n’allais plus chez eux non plus. Ma mère s’occupait de moi, enfin, si on veut. Disons que j’avais les clés de la maison, que je savais où se trouvait l’argent, les casseroles, tout ce qu’il me fallait pour m’occuper de moi. Oh, je ne m’en suis jamais plains. Puis ma mère était occupée à courir à droite ou à gauche pour décrocher des contrats de mannequins. Quand elle n’était pas là, je pouvais faire ce que je voulais, du coup je jouais aux jeux vidéos jusque tard la nuit, ou bien je regardais des films, des dessins animés… je lisais aussi, beaucoup. Bref, c’était pas si mal malgré tout. À l’école, j’avais mon petit groupe d’ami, des gens tous très différents, mais tous très sympas. On avait nos délires, et on se prenait pas la tête. Vous me direz, pourquoi se prendre la tête quand on a douze ans ? C’est après que les choses se sont gâtées.

Aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours aimé jouer et chanter. Du coup, très tôt j’ai voulu intégrer une comédie musicale. N’importe laquelle, je suis pas difficile moi vous savez. Quoiqu’à l’époque, Oliver Twist m’aurait bien tentée, puis ils cherchaient des gamins. Mais pour ma mère, c’était hors de question. Elle voulait que je reste à l’école, que j’étudie bien, que j’aie de bons points. C’était con, puisque c’était le cas. Mais en tout cas, elle ne voulait pas que je fasse des musicals. Elle ne voulait même pas que je prenne des cours en fait, elle n’en voyait pas l’intérêt. De colère en colère, de dispute en dispute, d’incompréhension en incompréhension, on a arrêté de se parler. En vrai, ça ne changeait pas grand chose à notre vie : elle était bien trop occupée à courir après le cul de ses managers que pour se rendre compte que sa fille vivait dans le même appartement qu’elle.

L’idée qui révolutionna ma vie vint de ma meilleure amie. J’avais une mère, certes, mais j’avais aussi un père. Savait-il que j’existais ? Probablement pas. Et si … Si je le retrouvais ? Cela pouvait paraître fou, mais si je le retrouvais, tout rentrerait peut-être dans l’ordre pour moi. Peut-être que j’aurais à nouveau une famille, que je pourrais réaliser mes rêves, prendre des cours de chant en plus du théâtre au lycée … Oui. C’était la seule et unique solution qu’il me restait. Avec mon groupe d’amis, on a pris une décision, celle de le retrouver. Depuis, on se réunit après les cours, chez l’un, chez l’autre, cherchant la moindre petite information sur ce mystérieux motard qui mis un jour ma mère enceinte … Aujourd’hui, la solution est là. Elle est toute proche. Je le sais. Et mon sac est déjà prêt pour le jour où je partirai.